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Orford : La montagne qui soulevait les foules

Un échantillon du Québec, un milieu de vie recherché

Colette Ansseau est professeure au Département de biologie et chercheuse en écologie forestière. Elle étudie l’organisation et la dynamique des communautés végétales.
Colette Ansseau est professeure au Département de biologie et chercheuse en écologie forestière. Elle étudie l'organisation et la dynamique des communautés végétales.

Ce mensonge grandiose, propagé par les guides touristiques jusqu'en 1914, fait place aujourd'hui à un constat singulier. Aussi humble soit son dénivelé, le mont Orford englobe une riche variété de milieux naturels : des forêts, des lacs, des étangs... Il compte des écosystèmes fort différents sur un territoire restreint. Avec le mont Sutton, le mont Orford compte parmi les seules montagnes qui permettent de découvrir sur un même site cinq forêts particulières au Québec, de l'érablière à caryer (sud) à la sapinière à bouleau blanc (nord), en passant par l'érablière à tilleul, l'érablière à bouleau jaune et la sapinière à bouleau jaune. «Pour retrouver la même diversité végétale, il faudrait partir de la frontière américaine et rouler jusqu'en Abitibi», souligne Colette Ansseau, professeure d'écologie terrestre à l'Université de Sherbrooke. Dans l'étude détaillée qu'elle a menée sur la flore du versant sud du mont Orford, elle a relevé la présence d'espèces végétales pour le moins inattendues, comme le ginseng, le trille blanc ou certaines espèces de bleuets. «Des espèces qui étaient rares ailleurs ont pu se développer en toute tranquillité parce que le site est protégé», explique-t-elle.

Au fil des années, la même chose s'est produite dans le cas de la faune, elle aussi scrutée par de nombreux chercheurs universitaires. Dans les vallées du parc ou sur les flancs des montagnes, on peut, bien entendu, rencontrer des cerfs de Virginie, parfois même des orignaux ou des ours, des coyotes ou des lynx, et beaucoup de ratons laveurs ou de castors, comme dans les forêts avoisinantes. Mais on trouve aussi la salamandre pourpre, la grenouille des marais ou la couleuvre à collier, et plusieurs espèces de parulines parmi les 200 oiseaux recensés. Sans oublier les immenses urubus à tête rouge dont le vol, du sommet du mont Chauve, est majestueux.

Don Thomas est biologiste et doyen de la Faculté des sciences. Il étudie les impacts des changements climatiques sur la survie de plusieurs espèces animales, dont les chauves-souris.
Don Thomas est biologiste et doyen de la Faculté des sciences. Il étudie les impacts des changements climatiques sur la survie de plusieurs espèces animales, dont les chauves-souris.

Le site est idéal pour étudier les écosystèmes. Le biologiste Don Thomas, doyen de la Faculté des sciences, y a étudié les populations de ratons laveurs pour déterminer leur mobilité ; cet élément est utile pour comprendre  la propagation de maladies comme la rage. On s'est aussi documenté sur le comportement du tamia rayé et de certaines espèces menacées de chauves-souris. «Depuis trois ans, nous participons au Programme de suivi de l'intégrité écologique (PSIE) de la Société des établissements de plein air du Québec», signale Manon Paquette. C'est là une façon concrète de vérifier que le territoire protégé du Parc national du Mont-Orford ne souffre pas trop des pressions exercées sur l'environnement.

«C'est un lien de protection et d'admiration, à la fois poétique et mythique, que les habitants des Cantons-de-l'Est ont noué avec le mont Orford au cours des générations», résume Jean-Pierre Kesteman.

Le Parc national du Mont-Orford a 70 ans cette année. Pour l'occasion, on soulignera cet anniversaire sobrement par le biais d'activités d'interprétation.